L’idée qui guide la réflexion de Michel Schneider, psychanalyste, est que « l’indifférence au sexe est la conséquence de l’indifférence entre les sexes ». Tout d’abord, rappelle-t-il, le sexe est un fait biologique : on naît femme ou homme. De cette réalité découle un certain nombre de représentations qui permettent à tout un chacun de se construire une identité sexuelle. Toutefois, selon l’auteur, à force de réclamer l’égalité entre les sexes à cor et à cri, ce ne sont pas les inégalités qui furent attaquées, mais bien les fondements mêmes de l’identité sexuelle.
Pourtant, tout est parti de bons sentiments. Les moyens contraceptifs et l’avortement, qui devaient apporter une libération sexuelle, sont venus en fait bouleverser l’équilibre entre les hommes et les femmes. Désormais, le lien obligé entre sexualité et reproduction était dénoué, laissant à la femme le plein pouvoir de la reproduction de l’espèce. Si une femme peut décider d’avoir un enfant, et ce, avec ou sans l’accord du père, un homme ne peut forcer une femme à porter son enfant. Idem en ce qui a trait au pouvoir de la reproduction sociale, alors que les femmes sont majoritaires dans les activités où l’enfant se façonne. Seule la politique semble encore échapper aux femmes, mais Ségolène Royal en France est venue démontrer la montée irrépressible de celles qui furent autrefois appelées le sexe faible. L’auteur procède par ailleurs à une analyse de certains de ses discours. Cet élément est d’autant plus intéressant que les prochaines élections au Québec verront une femme briguer le poste de premier ministre.
Ainsi, à force de rechercher à tout prix l’égalité entre les sexes, ce sont les frontières entre les rôles respectifs qui sont tranquillement gommées. Comment, dès lors, se construire un Soi assez solide pour être capable de vivre en couple avec une personne du sexe opposé et accepter l’expérience ultime qui consiste à avoir un enfant ? L’analyse de Michel Schneider permet de comprendre que certains choix que la société occidentale a faits dans le but de libérer l’humain ont eu l’effet inverse : en retirant certaines barrières soi-disant nuisibles, la société a fait disparaître des références essentielles reliées aux rôles de chaque sexe, références à la base de la construction de l’identité. Une analyse sincère et actuelle qui ne cherche pas à accuser, mais bien à faire prendre conscience de la richesse de la différence entre les sexes.