Depuis la parution d’Angoisse Play en 1978, Jean-Marie Poupart a publié une trentaine de titres. Celui qui, il y a quatre ans, nous offrait l’excellent roman On a raison de faire le caméléon, nous revient cette fois avec un essai sur l’acte d’écrire et sur l’institution littéraire en général. Sorte d’ « examen de conscience », de « bilan » de trente ans d’écriture, le livre est avant tout un tour d’horizon du monde de l’écrivain : on y parle du travail de création comme « cérémonie vivante » et du rapport personnel au texte, mais aussi de la relation avec la critique, avec l’univers de la réception.
Si « chez les mauvais essayistes », selon Jean-Marie Poupart, « la véhémence supplée aux carences du style », on remarquera que pour ce dernier il n’en est rien, bien au contraire. En ce sens, l’intention d’articuler, à la lumière d’expériences personnelles, un propos clair ne va pas sans l’envie de faire beau. Les phrases soignées, assorties d’un vocabulaire luxuriant, abondent dans ce livre. Sans aucun doute, le goût de parler de littérature passe par la littérature elle-même : l’essayiste n’oublie jamais qu’il est d’abord romancier. Quoique certains pourraient être agacés par le foisonnement d’énumérations parfois longues, il n’en demeure pas moins que cette prose, à la fois badine et érudite, est menée par une admirable maîtrise formelle. « Un style ne peut-il pas être à la fois riche et économe de ces effets ? » Cet ouvrage semble l’aboutissement d’une longue réflexion sur le plaisir singulier de créer avec les mots, une réflexion qui d’ailleurs s’illustre par sa forme même : c’est-à-dire par son indéniable littérarité.