Comme d’autres auteurs du Quartanier, Éric Plamondon amène avec Hongrie-Hollywood Express un vent de fraîcheur dans le monde plutôt convenu du roman québécois. Replacée dans la littérature mondiale, cette œuvre n’est pas absolument nouvelle, Plamondon devant entre autres beaucoup à son maître Richard Brautigan, dont le titre de son ouvrage, qui fait référence à Tokyo-Montana Express. Il y a aussi un peu de Georges Perec dans ces listes, courts poèmes ludiques et autres descriptions de style journalistique qui forment les chapitres de ce livre atypique. Mais nous ne sommes pas en terrain très connu. Le roman – appelons-le ainsi, puisqu’il n’y a pas d’autres termes – construit au fil des pages une logique bien à lui, où le drame d’une existence est raconté dans un jeu formel qui le brise et l’aplanit. Cette existence, c’est celle de Johnny Weissmuller, le célèbre interprète de Tarzan dans le film de 1946. Cet ancien médaillé d’or aux Jeux olympiques fut en son temps l’acteur le mieux payé d’Hollywood. Les millions de femmes qui rêvaient à lui n’ont jamais su ce qu’il lui arriva ensuite : après des déboires amoureux et financiers, il finira ses jours comme placier dans un restaurant de Las Vegas, avant de mourir à Acapulco. Sa vie est relatée par un certain Gabriel Rivages qui, à sa façon, aurait voulu, lui aussi, avoir sa biographie. Il est de ces hommes qui ont à peu près tout vécu mais n’ont rien accompli. Deux parcours de l’échec qui s’entrelacent et traversent l’histoire de l’Amérique depuis l’arrivée massive d’immigrants hongrois à la fin du XIXe siècle. À part les quelques répétitions qui auraient pu être évitées – des détails de l’histoire de Weissmuller racontés plusieurs fois, sans élément nouveau –, le roman de Plamondon est une belle réussite formelle. Il montre aussi que l’on peut toucher au drame sans tomber dans le pathétique ou le cynisme.
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