Hep taxi ! L’histoire du taxi à Montréal remonte à très loin, avant même l’avènement de l’automobile ! Mais comme le taxi fait partie du quotidien de beaucoup de Montréalais, cet historique permet par la bande d’explorer de nombreuses caractéristiques de la métropole.
Dans cette histoire de l’industrie montréalaise du taxi qui débute à l’ère du fiacre, chaque chapitre couvre une décennie en se concentrant sur un aspect particulier. Il y a un siècle, en 1921, le taxi montréalais constituait un moyen d’accéder à toutes sortes de destinations, y compris des passages secrets vers des zones illicites contrôlées par le monde interlope, dans une métropole très permissive : « Maints chauffeurs de taxi de Montréal arrondissent leurs fins de mois en se livrant à une forme ou une autre de trafic clandestin ». À une concurrence intense entre compagnies de taxi durant la crise économique de 1929 suit une période de prospérité durant la Deuxième Guerre mondiale, marquée par une pénurie de chauffeurs de taxi. En 1946, pour obtenir un permis de taxi, il fallait d’abord prouver que le chauffeur était « de mœurs honorables (en obtenant un certificat de bonne conduite) ». Dans les années 1950, quatre catégories de chauffeurs de taxi coexistaient : « [L]es déracinés des régions, les immigrants, les vétérans [de l’armée] et les ‘indésirables’ ». Encore préoccupante de nos jours, la question de l’intégrité et de la mauvaise réputation des chauffeurs de taxi avait déjà été analysée dans un mémoire de maîtrise en 1955 ; l’universitaire Edmund Vaz concluait que la malhonnêteté était généralisée et légitimée dans l’industrie montréalaise du taxi au cours des années 1950 : « Pour les chauffeurs de taxi, voler est une des dimensions de leur travail. Le vol n’est donc pas considéré comme un comportement déviant. Cela fait partie intégrante de la vie d’un chauffeur ». Les dernières décennies ont été marquées par la diversification de la concurrence – déjà féroce – avec l’apparition de nouvelles formes de taxi axées sur un concept ou un groupe (les voitures électriques, les formules hybrides combinées avec un autre mode de transport…). En outre, « la révolution UberX » veut désormais imposer à l’ensemble de la profession un niveau supérieur de qualité, de fiabilité et de redevabilité auprès d’une clientèle exigeante.
La conclusion rappelle une constante : beaucoup de chauffeurs de taxi se sentent « libres » quant à leur horaire considéré comme flexible, alors qu’en fait, le facteur « chance » semble prépondérant. Si on se met au travail quand on veut, mais que la clientèle n’est pas au rendez-vous, aucun revenu ne sera généré. Il faut se trouver au bon endroit au moment propice. Touchant à la fois la sociologie du travail et les études urbaines, cette Histoire du taxi à Montréal conviendra à un lectorat très large. On apprécie la grande diversité des sources consultées, allant de la thèse de Kimberley Berry (sur les taxis à Toronto) jusqu’à une foule d’enquêtes, de rapports, d’archives et différents journaux. Espérons que beaucoup de chauffeurs de taxi pourront lire cet essai !