Depuis plusieurs années, on parle d’un vaste projet collectif de réseau structurant de transport en commun à Québec. Mais duquel, je vous prie ? Car au siècle dernier, et même au XIXe siècle, il existait un tel réseau sur rails dans la capitale nationale, avant que celui-ci ne soit démantelé pour laisser toutes les rues aux autobus et automobiles. Comme les temps changent !
Après son Histoire de l’autobus par l’image 1. Les trajets touristiques parue chez le même éditeur, le conférencier Jean Breton nous offre une histoire définitive du tramway à Québec. Érudit, intarissable, incollable sur ce sujet, Jean Breton est le grand spécialiste en tout ce qui touche de près ou de loin les tramways, comme le prouvent ses conférences publiques, toujours passionnantes. Ayant lui-même connu l’époque des petits chars, Jean Breton sait exactement où se trouvaient les parcours, les emplacements des rails, les gares et les arrêts de tous les tramways de Québec, de Lévis et de la côte de Beaupré. Plus d’une centaine de photographies anciennes, pour la plupart très rares, font revivre cette époque, avec les premiers omnibus tirés par des chevaux (dès 1865) ou encore, pour les jours ensoleillés, le modèle panoramique (c’est-à-dire sans toit), aussi nommé char observatoire, qui parcourait la côte de la Fabrique devant le restaurant français Kerhulu et le magasin Simons, en été seulement. Datant pour la plupart de la première moitié du XXe siècle (ou de la fin du XIXe), les illustrations montrent des tramways circulant sur la Grande Allée, la rue Saint-Jean, la côte d’Abraham, la place d’Youville, la place d’Armes, ou encore sur la 5e Rue, juste devant l’église Saint-Charles-de-Limoilou.
Les tramways ont disparu de la haute-ville de Québec le 14 octobre 1947 et le 27 mai 1948 de la basse-ville ; mais ceux qui allaient vers Sainte-Anne-de-Beaupré ont fonctionné jusqu’au 15 mars 1959. On réalise que la mémoire visuelle de la ville ’est souvent faite sans ce souvenir des tramways, mais encore fallait-il que le photographe puisse les capturer en mouvement ! Les explications détaillées accompagnant chaque illustration sont d’une précision inégalable quant aux parcours, aux dates et même aux numéros de tous les modèles ; l’auteur peut situer l’emplacement de chaque image pour en décoder les composantes et en contextualiser les moindres détails. Chaque page raconte la petite histoire d’un quartier, d’un coin de rue ou d’un immeuble disparu depuis lors. Ainsi, à un siècle d’intervalle ou presque, on constate qu’il y avait beaucoup d’affichage et de publicités unilingues en anglais à Québec, même sur les tramways. L’un d’entre eux indiquait comme destination Maple Street (redevenue avenue des Érables), dans le quartier Montcalm.
Cette incomparable Histoire des tramways de la région de Québec comble un vide et sera comme un cadeau inespéré pour les chercheurs en histoire ferroviaire et en histoire urbaine. Mais c’est aussi – et surtout – une composante essentielle de la mémoire de la ville de Québec.