Un sixième ouvrage en six ans. Non seulement l’inspiration de l’autrice d’Encabanée ne s’est pas tarie, mais elle s’est renouvelée. Après avoir tâté du thriller écologique dans Sauvagines, c’est maintenant vers la dystopie que se tourne la romancière.
Dans Hexa, récit d’anticipation dont l’action nous transporte à la fin du XXIe siècle, de grands incendies ont ravagé le territoire québécois. Tel un oiseau en cage, la population vit dans des cités murées, soumise à de nombreuses restrictions. Un groupe de femmes, employées de Reforestation MiliTerre, peuvent cependant échapper une partie de l’année à ce régime oppressif en se rendant dans un camp de reboisement situé dans le Nord du Québec. Dans le cadre du projet « Forêt Neuve », elles ont pour tâche de planter 2 000 arbres chaque jour. À la faveur d’un stage exceptionnel qui lui est offert, Thalie Rousseau, une adolescente de Sainte-Foy, pourra documenter le quotidien des planteuses pendant quelques mois. Sa motivation secrète est de se rapprocher de Sandrine, sa mère souvent absente, qui appartient à cette sororité de quasi-nomades. Ce faisant, l’enjeu deviendra vite pour Thalie de choisir entre le monde des machines et celui des planteuses, surnommées « les fées ». En cet été où elle s’apprête à faire l’expérience de ses premières règles et à trouver l’amour, son choix pourrait bien décider du reste de sa vie.
À l’instar de Margaret Atwood dans ses fictions spéculatives, Gabrielle Filteau-Chiba trace ici une vision inquiétante mais plausible de l’avenir. Les libertés individuelles ont largement été supprimées. En plus d’être surveillés par des drones et des robots-scanneurs, les individus sont forcés de porter des implants (des puces sous-cutanées). Pour enfanter, un permis de grossesse est requis. L’État n’hésite pas à imposer une hystérectomie aux contrevenantes. Dans les centres urbains, les arbres ont été modifiés génétiquement, alors que l’oxygène est produit par des capteurs de carbone. Malgré ces éléments dystopiques, Hexa n’a rien de démoralisant. Au contraire, l’autrice a privilégié la voie de la résistance et de l’espoir. Révolution, quand tu nous tiens…