Francine Chicoine, spécialiste du haïku, m’a parlé avec tant d’enthousiasme des travaux de Dominique Chipot que j’étais tout triste de ne pas trouver ici en librairie Tout sur les haïkus (Aléas, 2006). L’auteur rayonne pourtant dans toute la communauté francophone du haïku, et les amateurs ont déjà applaudi ses traductions (pensons à l’anthologie Du rouge aux lèvres, Haïjins japonaises, La Table Ronde, 2008). Enfin, hourra, troisième trimestre 2011, les éditions Tire-Veille et David nous présentent la nouvelle collection « Regards sur le haïku », qui réunira des essais et réflexions. Premier titre de la collection, coup de bol : Haïku dō, un guide signé Chipot et à l’image de l’illustre poème : bref, clair, incisif, et éminemment pratique.
Des techniques et astuces précises, certes, mais juste assez de théorie pour arriver à la transcender. Car ne soyons pas naïf : « La forme n’est finalement qu’un outil au service du poète. Rien d’autre et il semble vain de définir le haïku en ‘poème de 17 syllabes réparties sur 3 lignes’ ». L’auteur avertit encore ses collègues et amis auteurs (on sent bien une amitié, que l’on doit peut-être à l’habitude des ateliers d’écriture) : « Nous ne devons pas publier des choses banales que quiconque pourrait écrire [ou] nous attarder sur des visions superficielles comme ‘avec bruit / plonge / une grenouille’ », soulignant au passage le sentiment de lassitude que suscitent certaines traductions du célébrissime haïku de Bashô.
En exergue, un Pennac en grande forme met l’ambiance : « La spontanéité, ça s’éduque ». De quoi éviter les trop-pleins romantiques. Car « même s’il est le fruit d’une impression vive, ne nous pressons pas. Le haïku peut parfois être mijoté. Sa spontanéité, sa fraîcheur ne pâtiront pas de quelques judicieuses corrections ». Et encore : « Peut-être notre regard sur le monde changera-t-il, peut-être notre vie évoluera-t-elle. […] Mais si aucun changement ne vient, peu importe. Ce n’est pas le but. Le haïku est un art, pas une thérapie, même si, par sa valeur spirituelle, il peut aider certains à surmonter leur vie ».
Se mérite une place de choix dans la bibliothèque de tout amateur, peut-être entre le délicieusement irrévérencieux Petit manuel pour écrire des haïku de Philippe Costa (Philippe Picquier, 2000) et le plus classique mais non moins attachant Fourmis sans ombre de Maurice Coyaud (Phébus, 1978). À noter : les haïkistes bien de leur temps trouveront Haïku dō en version numérique !