La grande illusion est un court roman destiné à un public trentenaire. Il évoque cette tendance de tout un chacun à l’automatisation par l’incarnation d’un personnage, le même que tout le monde, aligné sur les mêmes goûts, les mêmes habitudes. C’est un clin d’œil aux jeux de rôle qui chevauchent parfois la vraie vie ou à toutes ces carapaces hypocrites nées du désir de plaire, de se fondre dans le moule.
V., jeune femme désillusionnée par l’immatérialité de la vie, demande à son ami de lui rédiger ses prochains 365 jours, de sorte que son histoire soit définie à l’avance et qu’elle soit désormais tangible, réelle. L’histoire de V. prévoit les gens qu’elle visitera, invitera, les lieux qu’elle fréquentera, les plats qu’elle achètera… jusqu’aux amants, qui seront fixés dans l’encre de l’histoire. Au moyen de cette mise en abyme du personnage d’un livre qui incarne lui-même le personnage d’un livre, Stéphanie Corriveau réussit, avec son premier roman, à aborder le sujet de l’anomie. Elle crée des scènes où les tentatives de communication sont vaines, où les endroits meublent à eux seuls une myriade de questions et où les habitudes engendrent des psychoses au quotidien. La grande illusion transpire le désordre structuré d’une vie inventée, mais qui se matérialise au fil des lignes. Une autre dimension du temps surgit…
Rempli de digressions, de courts dialogues auxquels l’histoire de V. met un terme abruptement, d’apparitions de personnages qui ne servent pas du tout l’évolution du récit, ce petit roman de l’absurde, bien que n’étant pas une pièce de théâtre, met à profit les procédés linguistiques propres à Eugène Ionesco, entre autres. Dans La grande illusion, les thèmes et les enjeux prennent tout leur sens dans la forme.
Ce roman s’adresse aux curieux, aux aventuriers indifférents à la vérité, sensibles à l’idée que nous sommes tous des pantins dans une société dictatrice malgré elle.
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