Récit d’une aventure vécue aussi imprévisible qu’un scénario de film d’action, ce livre se lit d’un trait, comme un roman. Ainsi que le titre l’indique, il témoigne de l’expérience en captivité de Gilles Prégent, pilote d’hélicoptère québécois tombé, avec deux compagnons, aux mains des guérilleros des Forces armées révolutionnaires de Colombie (les FARC) le 20 avril 2002, quelque part le long du Rio Patia.
La narration à la troisième personne, assumée par le journaliste Benoît Lavoie, laisse place ici et là au point de vue du héros lui-même. En effet, la quatrième de couverture nous explique que, durant tout ce temps passé à la pointe des kalachnikovs, « il a scrupuleusement noté dans son journal les faits quotidiens – dont ses tentatives d’évasion – et ses pensées intimes ». Criants de vérité, ces propos directs, en retrait dans le texte, ne contribuent pas qu’un peu à maintenir l’intérêt du lecteur. L’on a aussi sous les yeux, entre autres documents utiles (cartes, photographies, coupures de presse, fac-similé du journal de Prégent), des dessins des scènes et lieux de la main même du captif.
Avec de tels éléments, difficile de ne pas se sentir interpellé par les événements dramatiques racontés ; d’autant que la perspective que Benoît Lavoie adopte est double : d’une part, celle du prisonnier aux prises avec l’oisiveté, l’abattement (sans compter les scorpions, araignées et serpents, parmi ses hôtes) et, d’autre part, celle de sa conjointe, Carmen Gloria Torres Ebner, restée au Québec avec leurs enfants. À cet égard, il faut noter que le volume n’évite pas toujours le piège du mélodrame. Mais généralement, il se montre à la hauteur du défi : rendre sensible une manchette parmi tant d’autres, qui s’envolerait comme paroles au vent si ce n’était des écrits de ce genre.