Dans sa nouvelle publication, Roméo Bouchard raconte l’histoire du village et des gens de Saint-Germain-de-Kamouraska. C’est là que ce natif de Normandin, au Lac-Saint-Jean, est venu s’établir en 1975, à 39 ans, pour y assumer une vie d’agriculteur biologique autosuffisant, après avoir quitté les ordres (les Oblats, selon Internet), enseigné à Jonquière et étudié en sciences politiques à Montréal.
Gens de mon pays nous fait entrer dans l’intimité de Saint-Germain par le biais de dix-huit courts tableaux où évoluent des citoyens qui furent remarquables, d’une façon ou d’une autre. Militant et agent de développement de son village d’adoption, Roméo Bouchard retrace les petits et grands événements de la vie de personnes et de groupes qu’il a côtoyés depuis son installation dans cette localité du Bas-Saint-Laurent.
Il relate d’abord le long conflit laïco-religieux survenu au moment de la construction de la première église de Saint-Germain, au cours duquel on a fait appel à une communauté protestante. Apparaît ensuite le légendaire Isidore Lévesque, qui pratiquait déjà l’agriculture biologique tout en faisant le commerce des chevaux de course ; c’est sa terre que l’auteur a acquise à son arrivée dans la région. Défilent alors des familles : la lignée fondatrice des Moreau, qui incarnait la tradition paysanne et paroissiale ; le clan des sept frères Thériault, qui faisaient la loi dans le parc du village ; les sœurs Parent, Lucienne et Jeannette, deux célibataires septuagénaires dont Roméo Bouchard souligne la chaleur et la vitalité. On rencontre aussi des hippies : Lise, la première du genre au Kamouraska, artiste et artisane passionnée par les chevaux, et Gaston, avec ses côtés ange et bête insoumise, mort à 28 ans dans un accident d’auto. Il y a encore la digne Yolande, la sœur de combat la plus loyale qu’il ait été donné au portraitiste de connaître ; le paysan Ernest, l’un des « derniers grands personnages indépendants qui voyaient venir en toute lucidité la société de productivité et de consommation insensée » ; madame Sylvain, une Acadienne d’origine micmaque, qui a connu une grande misère ; le biologiste globe-trotter Jean-Denis, qui s’est pendu après une dépression d’origine amoureuse ; le rassembleur « néorura[l] » Élyme Gilbert, qui a restauré le manoir patrimonial Rankin, dont les déboires furent nombreux ; le tenace et astucieux maire Benoit Bérubé, qui dirigeait « son conseil et sa municipalité d’une main ferme et adroite, un peu à la façon d’un Duplessis… libéral », et qui est souvent entré en conflit avec l’auteur. Trois autres villageois complètent le tableau : la sympathique Claire Parent, dont l’ouverture aux autres a conquis tout le monde lors de son bref passage à Saint-Germain ; Adrienne Desmeules, couturière et coiffeuse, qui développa une passion pour l’écriture après la mort de son mari ; et Benoit Beaulieu, hercule rêveur qui a aidé le nouvel agriculteur à construire sa cabane à sucre.
Au gré de ses souvenirs, Roméo Bouchard fait état de multiples institutions rurales : le traditionnel bénévolat féminin, l’accouchement à la maison, la pêche à l’anguille et à l’esturgeon noir, la trappe, le passage des oies blanches… Il constate de même la fin des fermes laitières et la progression de l’industrie à culture intensive, l’application du zonage agricole, l’exode des jeunes, le déclin des régions et des familles terriennes… Il cite également à plusieurs reprises des pages du petit journal qu’il a fondé, L’Écho de Saint-Germain.
Gens du pays, dont le titre est emprunté à la chanson éponyme de Gilles Vigneault, d’ailleurs reproduite en ouverture, est une « ode à la campagne et à la ruralité » (quatrième de couverture). C’est un opuscule rédigé dans un style simple où l’auteur affirme ne pas dire toute la vérité mais ne rien inventer.
ESPACE PUBLICITAIRE
DERNIERS NUMÉROS
DERNIERS COMMENTAIRES DE LECTURE
Loading...