Depuis le temps qu’il observe la conduite du monde et qu’il coule, complice de l’instant, des jours lents à en consigner les manifestions les plus évidentes comme les plus discrètes, Patrice Desbiens est sans nul doute devenu l’ultime mémorialiste de la quotidienneté.
Avec des mots simples et un phrasé souple naviguant à vue entre bebop et cool jazz, la poésie de Desbiens, sous ses airs de comptines pour grands enfants délurés, amuse, (d)étonne et, au détour, laisse songeur autant qu’elle émeut.
En temps et lieux fut d’abord une série de trois cahiers portant le même titre, ouvrages publiés en 2007, 2008 et 2009 chez L’Oie de Cravan et que la maison propose à nouveau, rassemblés en une édition de poche revue et corrigée par l’auteur. L’ensemble offre aux lecteurs le plaisir de renouer avec cet art déambulatoire et contemplatif que pratique Desbiens à travers sa poésie. Les hommes et les chiens dans les rues, les oiseaux ou les étoiles dans le ciel comme les chansons de la radio résonnant entre les murs d’une chambre ou d’un café constituent chez le poète une cosmogonie du subtil et de l’ordinaire. « J’ai le souvenir de l’espace / entre les planètes. », avance-t-il comme s’il faisait un aveu avant d’exposer sa démarche : « Je prends les yeux aux / passants et / je les mets / dans mes poèmes ». Comme un vieux ratoureux, l’auteur redessine un monde multiple et unique à la fois, celui des autres et le sien, à l’improbable croisée des chemins de traverse. Cabotine par moments, légère et grave, la parole de Desbiens est surtout un (r)appel essentiel : « On ne vit pas de rêves / on rêve de vivre / sobre ou ivre / c’est toujours le même / livre // Sobre ou ivre / on rêve de vivre / à la dernière page / on ferme le livre ».
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