La renommée des auteurs provenant de pays nordiques n’est plus à faire et cette nouvelle venue s’inscrit dans cette mouvance.
Son récit Elma se déroule au nord-ouest de Reykjavik, à Akranes, là où, pour parodier Hamlet, il y a quelque chose de pourri. Trop de femmes y disparaissent.
Les auteurs affirmés Ragnar Jónasson et Yrsa Sigurdardóttir ont adoubé Eva Björg Ægisdóttir – et son livre Elma – en lui octroyant en 2018 le Blackbird Award, prix créé pour donner un coup de pouce aux primo-romanciers de polars islandais. Née dans cette même petite ville d’Akranes en 1988, l’autrice a étudié à Reykjavik et en Norvège ; elle vit maintenant dans la capitale de l’Islande avec sa famille.
Tout comme la romancière, la protagoniste Elma est retournée vivre sur les terres glacées de son enfance. Pour l’inspectrice de la brigade criminelle, cependant, revenir habiter chez ses parents à la mi-trentaine n’a rien de glorieux. « Si je peux me permettre, qu’est-ce qui t’a poussée à revenir ici après tant d’années passées à Reykjavik ? » On se le demande en effet. Bien entendu, au-delà du calme et de la paix de la petite bourgade un rien ennuyante, la mort et ses mystères seront au rendez-vous.
À l’aide de nombreux retours en arrière, le lecteur et la policière revivront des épisodes lointains, dans les années 1989-1990, révélateurs des origines du drame. « Avant même d’ouvrir la porte, elle sentit qu’un malheur allait arriver. » Et l’enfant Elisabet avait alors, hélas, raison. Ce n’était que le début d’une série de crimes demeurés longtemps secrets, dont l’émergence plus de 25 ans plus tard fera vaciller la petite communauté d’Akranes.
De chapitre en chapitre, le lecteur et la policière pourront établir des liens entre le passé franchement sordide et les atrocités du temps présent, dont la découverte d’un premier cadavre n’est que la pointe de l’iceberg : « Ce n’était pas la fourrure d’un animal. C’était la chevelure d’une femme qui ondoyait au gré des flots ».
Femmes battues, féminicides, agresseurs sexuels, enfants maltraités, Elma et son équipe d’enquêteurs auront fort à faire dans ce village isolé où tout le monde se connaît ou, du moins, pensait se connaître. L’atmosphère y deviendra de plus en plus irrespirable.
La première œuvre d’Eva Björg Ægisdóttir tient davantage du roman psychologique que du thriller, ne révolutionne pas le genre, mais demeure agréable à lire, quoique l’abondance de personnages secondaires puisse facilement créer de la confusion.
Malgré certaines craintes, la double traduction de l’islandais à l’anglais, puis au français ne semble pas nuire à la qualité de l’œuvre La version anglaise du second roman d’Eva Björg Ægisdóttir, Girls Who Lie, parue à l’été 2021, met encore en vedette l’inspectrice Elma. Est-ce le signe qu’il y aura série ? Si les crimes sont rares en Islande, les auteurs de polars sont, eux, prolifiques.