Encore aujourd’hui, les voyages en solo représentent un défi pour les femmes. Certes, ils ne sont plus ce qu’ils étaient au XIXe siècle alors que les aventurières devaient parfois se déguiser en hommes pour passer inaperçues. Mais ils n’en exigent pas moins une certaine dose d’intrépidité et n’en font pas moins vivre d’enrichissants apprentissages, ce qui contribue sans doute à rendre aussi inspirants les récits qui en résultent.Le présent ouvrage collectif nous propose justement « 10 récits inspirants de voyageuses » parties seules pour faire face à l’inconnu. Les destinations et les façons de les parcourir varient considérablement d’un récit à l’autre : de la côte est américaine en road trip à la Turquie sur le pouce, en passant par l’Indonésie, Londres, l’Amérique centrale, l’Argentine, l’Afrique de l’Est, le Costa Rica, l’Inde et le Grand Nord québécois. En revanche, la formule proposée aux autrices est clairement balisée. Chacun des dix brefs récits, en moyenne d’une quinzaine de pages, est précédé d’une même rubrique composée d’énoncés comme « Partir en solo, c’est pour moi… », « Ce qui m’a amenée à vouloir partir toute seule », « Et les craintes, dans tout ça ? », et se termine par une même partie intitulée « Ce que j’ai appris dans tout ça ». Cette structure offre l’avantage de mettre clairement en contexte chaque témoignage. Toutefois, elle n’échappe pas à une certaine répétition. D’une autrice à l’autre, en effet, reviennent parfois les mêmes sources de motivation et les mêmes constats sur les avantages du voyage en solo. La plupart parcourent le monde pour répondre à l’appel de l’aventure, pour « voir le monde différemment », pour partir à la rencontre de soi-même et des autres, pour se reconstruire à la suite d’un deuil, etc. Et voyager en solo offre la possibilité d’éprouver un sentiment d’« ultime liberté », de surmonter ses vulnérabilités et ses peurs, d’apprendre à se faire confiance, de « profiter pleinement du fameux ‘moment présent’ qu’on nous incite tant à vivre », de « perdre ses repères pour se retrouver », de faire des « rencontres authentiques et significatives », etc. Bien entendu, cette passion commune pour le voyage en solitaire n’enlève rien à la prégnance et à l’originalité des récits d’aventures ponctués de doutes, d’adaptations et de résilience devant la solitude, l’ennui et la perte de repères. On comprend que pour chacune des autrices, le voyage en solitaire constitue un accomplissement qui permet d’acquérir une plus grande confiance en soi et de développer une « force intérieure » souvent nécessaire pour composer avec la « part d’incontrôlable et d’imprévu » de l’existence. En cela, ces témoignages restent certainement inspirants ! Mais on aurait souhaité retrouver dans l’ouvrage quelques cas d’expériences moins concluantes. Une petite dose d’ironie, voire d’autodérision sinon d’anti-héroïsme, par exemple. Cela n’aurait-il pas contribué à surprendre un peu plus les lectrices et les lecteurs ? Le voyage en solitaire est certainement une expérience enrichissante qui forme et transforme, mais le récit qu’on en fait peut parfois se permettre de nous amener là où on ne s’y attendait pas ! Une citation de l’écrivain voyageur suisse Nicolas Bouvier, qui se trouve en exergue entre deux récits de l’ouvrage, est pour le moins évocatrice à cet égard : « C’est le propre des longs voyages que d’en ramener tout autre chose que ce qu’on y est allé chercher ».
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