Le titre de ce roman fait référence à deux événements phares de l’histoire de la Tunisie, soit les « émeutes du pain », ayant eu lieu en 1984, et la « révolution du jasmin », qui s’est produite en 2011. Deux révoltes animées par une volonté de justice et de dignité dans ce pays de soleil gouverné par seulement deux hommes entre son indépendance en 1956 et la révolution de 2011, soit Habib Bourguiba et le flic Zine el-Abidine Ben Ali.
L’auteure (épouse de Maher Arar, ce citoyen canadien injustement emprisonné en Syrie à la suite du 11 Septembre) utilise ces deux événements historiques de sa Tunisie natale pour décrire l’éveil de la conscience politique de Nadia, au début des années 1980 contre le régime vieillissant de Bourguiba, puis de sa fille Lila, quelque 25 ans plus tard, lors de la révolution ayant chassé du pouvoir le bourreau Ben Ali.
Fille de la classe moyenne, Nadia prend petit à petit conscience de la pauvreté et de l’injustice sociale prévalant dans son pays à la faveur des actions politiques menées par Mounir, le copain de sa meilleure amie Neila. Ce Mounir contestataire sera injustement emprisonné pendant sept ans, et la jeune Nadia fera pour le venger un geste de trop, soit d’insulter la fille d’un apparatchik du régime policier : elle se sentira forcée de quitter le pays avec son premier amoureux, Alex, un francophone canadien rencontré au centre culturel américain.
Des années plus tard, Nadia, qui habite maintenant à Ottawa, incite sa fille Lila, alors adulte, à parfaire son arabe à Tunis. Hébergée par le couple Neila-Mounir, Lila se frotte, elle aussi, comme sa mère, aux dures réalités du pays, notamment sa dictature caricaturale et la stagnation économique, sociale et politique qui y sévit. Puis, victime d’une injustice, un homme s’immole. La révolte gronde dans le pays, et Lila voit sa vie transformée par l’enivrement ressenti devant le triomphe d’un peuple qui met enfin à bas un régime repu et apeuré.
Ayant vécu cinq ans en Tunisie, presque exactement aux périodes décrites dans ce roman, dont la révolution de 2011, j’ai apprécié la justesse du portrait social tracé par Monia Mazigh. Les descriptions des personnages, des lieux, des ambiances, des habitudes sociales, des mentalités du pays ayant eu cours durant la révolution du jasmin y sont si proches de la réalité qu’on lit le roman comme si on était sur place : bref, une incursion intimiste, fluide et réussie dans des moments critiques de la vie d’un pays devenu le phare démocratique de tout le monde arabe.
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