La maison d’édition GID, dirigée par l’historien Serge Lambert, s’est donné comme mission de faire connaître l’histoire du Canada et du Québec à travers celle des régions.
En retraçant la vie de son grand-père, médecin et chirurgien, de surcroît maire de Rivière-du-Loup, la biographe relate la vie sociale et politique d’un homme engagé et, par ricochet, celle de son époque et de son milieu.
Natif de la Beauce dans une famille modeste, Antonio Paradis entreprend néanmoins de longues études au Petit Séminaire de Québec, puis à la Faculté de médecine de l’Université Laval. Reçu médecin en 1918 et aussitôt marié, il s’installe avec sa femme, Alice Lavergne, à Fraserville, devenue peu après Rivière-du-Loup, ville en expansion où l’on vient de construire un nouvel hôpital, baptisé Saint-Joseph-du-Précieux-Sang. Comme partout au Québec à l’époque, l’hôpital est géré par des religieuses, sous le patronage de l’Église catholique à laquelle est soumise l’éthique médicale. Le Dr Antonio Paradis incarne les valeurs de charité et de don de soi rattachées au statut de vocation qu’accorde alors l’Église aux médecins. Il se rend chaque matin à l’hôpital pour pratiquer la chirurgie et visiter ses patients, et reçoit des malades à son bureau en après-midi et en soirée, en plus de faire des visites à domicile, même la nuit, hiver comme été. Si Ti-Père, comme le surnomment les infirmières, est reconnu pour ses compétences de chirurgien notamment, il ne l’est pas moins pour son écoute, sa patience et son empathie. Tous les témoignages qu’a reçus l’autrice au cours de ses recherches vont dans le même sens, tellement que la biographie se rapproche de l’hagiographie.
De même en est-il pour ses dix-huit ans de service à l’hôtel de ville, six ans comme échevin, maire pendant douze ans, et ce, sans délaisser la pratique médicale. Au contraire, il poursuivra son perfectionnement en chirurgie générale jusqu’à l’obtention du certificat du Collège royal du Canada, en 1948. Sa vie politique occupe toutes ses fins de semaine. L’autrice, ayant mené ses recherches pendant dix ans – archives, entrevues de contemporains de son sujet, journal local Le Saint-Laurent –, fait état des accointances du docteur avec des hommes de pouvoir, tels Maurice Duplessis, Mgr Camille Roy et le député fédéral Jean-François Pouliot. Assemblées politiques, réceptions officielles, conférences et présidence d’associations médicales et politiques s’accumulent dans son agenda.
De la vie privée d’Antonio Paradis, on apprend qu’il est père de quatre enfants, et qu’il s’en remet à sa femme pour leur éducation. Que les qualités de femme du monde de celle-ci sont mises au service de l’homme public dans toutes ses tâches officielles, dont les fastueuses réceptions qu’elle organise dans leur maison cossue. Finalement, on retient que cet homme n’a eu de cesse de soigner des malades avec compassion et de travailler au progrès de sa ville pour le mieux-être de ses concitoyens. Il lui aura fallu subir un arrêt cardiaque pour penser à prendre des vacances. Le travail de mémoire de sa petite-fille historienne lui rend hommage à juste titre.