Aussi bien le dire tout de suite, le lecteur qui entreprend De retour de Babel, Une histoire biosophique de l’humanité s’attelle à un exercice très exigeant. Cet essai qui se propose de démontrer que la vérité de l’Homme ne s’appréhende pas dans son discours mais dans son animalité – d’où le titre – s’adresse à un lectorat qui possède infiniment plus qu’une honnête culture scientifique.
En fait, l’étendue et la profondeur des connaissances scientifiques mises en branle par le trio d’auteurs pour faire la démonstration de sa théorie et le recours au vocabulaire afférent, en font un livre à la portée d’un lectorat très restreint. Dommage parce que son postulat est stimulant.
Du big bang à la brebis Dolly, les auteurs démontrent comment le fonctionnement de la matière puis de la cellule crée, par effets cumulatifs et combinés, un déterminisme qui fait de l’homme un être conditionné par sa biologie, « une nef porte-génome », et non un être agissant de son libre arbitre, comme nous l’enseigne la philosophie traditionnelle.
Au passage, les auteurs prennent un malin plaisir à égratigner les ratiocineurs de tout acabit, étrangers à l’expérimentation, qu’ils appellent avec un mépris mal dissimulé, les « adeptes de la méditation dont l’instrument privilégié est le fauteuil ». À leurs yeux, « le penseur-discoureur [ ] est l’entremetteur obligé entre ceux qui tiennent ou désirent le pouvoir et les dociles qui rêvent de s’intégrer dans le groupe qui pense bien, la bonne tribu ».
Les auteurs réussissent-ils à faire la preuve de la suprématie du biologique sur le philosophique ? À d’autres d’en juger. Quant à nous, malgré quelques éblouissements, nous devons avouer que ce livre a pris la mesure de notre ignorance.