Cours de danse pour adultes et élèves avancés de Bohumil Hrabal (1914-1997) ne ressemble à rien d’autre. Encore plus acerbe que Thomas Bernhard, mais drôle comme un Réjean Ducharme, avec l’excès et la crudité d’un homme qui aurait trop bu, l’écrivain tchèque raconte en un peu plus de cent pages les épisodes marquants d’une vie rendue à son terme. L’œuvre se présente comme une longue phrase dans laquelle s’enchaînent des idées apparemment disparates, mais qui peu à peu dessinent une sorte de danse de la conscience. L’ouvrage donc, et comme l’indique d’ailleurs son titre, ne s’adresse pas aux lecteurs débutants… ni à un public non averti. « […] la vraie poésie doit faire mal, comme si on avait oublié une lame de rasoir dans son mouchoir et qu’on se coupait le nez en se mouchant, parce qu’un bon livre n’est pas fait pour endormir le lecteur mais pour qu’il saute de son lit et qu’il coure en caleçon taper sur la gueule de l’auteur. » Pas étonnant que deux de ses livres aient été pilonnés après l’invasion soviétique, en 1970, et qu’il lui fut pendant quelque temps interdit de publier. On invoqua alors les motifs de « grossièreté et de pornographie ». Cours de danse nous fait passer des scènes érotiques à la violence des tranchées à l’art puis aux considérations sur la religion, et cela sans transition, comme si toutes ces choses étaient faites d’une seule et même matière, comme si l’érotisme était violence et art, et que l’art était une guerre sans fin… On sort de cette lecture admiratif et ébranlé.
L’on doit souligner la nouvelle traduction de François Kérel, qui a su rendre toute la finesse et la vivacité de ce style en outre très musical. Le livre était paru une première fois en français en 1969, cinq ans après sa publication originale.