Aux petites heures du matin, un chauffeur de taxi s’arrête à un dépanneur de la banlieue de Göteborg pour acheter des cigarettes. À l’intérieur, il découvre le corps de trois hommes, le visage arraché par des coups de fusil tirés à bout portant. Bienvenue dans Ce doux pays d’Åke Edwardson.
Ce doux pays dont nous parle Edwardson, c’est la Suède ancestrale, celle des matjes et des schnaps ingurgités la nuit de la Saint-Jean, celle de la social-démocratie et du soleil de minuit. À cette Suède immuable Edwardson oppose une autre Suède, celle de l’immigration, de la xénophobie et de l’omerta. C’est à la lisière de ces deux mondes que se déroulera l’enquête, toutes les victimes étant d’origine perse, kurde ou africaine.
D’entrée de jeu, nous savons qu’il existe un témoin de la fusillade : un jeune garçon en fugue cette nuit-là. L’auteur émaille son récit des soliloques de cet enfant tenaillé par la peur, mêlés, à leur tour, au récit d’une évasion d’un pays qui pourrait tout aussi bien se situer au Moyen-Orient qu’en Afrique. On est donc plongé simultanément dans trois univers dont deux seulement semblent liés.
Les familiers des livres d’Edwardson savent que leur intérêt réside presque autant dans les relations entre les membres de l’équipe d’enquêteurs que dans la résolution des crimes auxquels ils font face. On sait également que le rythme trépidant n’est pas la marque de commerce des récits d’Åke Edwardson. Sans doute on ne s’y traîne pas les pieds, mais on emprunte souvent les mêmes sentiers, on réécoute les témoignages, on relit les rapports, on revisite les lieux du crime. Bref, on récapitule souvent. C’est grâce à la persistance qu’on finit par trouver la solution et non à la suite de la découverte de quelque pierre de Rosette.
Ceux qui aiment les intrigues où le contexte compte autant que les crimes eux-mêmes et où les policiers font également office de travailleurs sociaux seront bien servis par Ce doux pays. Ceux qui aiment les enquêtes plus serrées et plus trépidantes trouveront, par contre, le temps un peu long.