Pour un été, le poète Claude Paradis a pris pied sur la rive et quitté sa barque, celle de la « dérive des jours » et du tourbillon quotidien des obligations, et s’est retiré pour trois mois dans une solitude longtemps attendue, afin de retrouver la clarté des eaux qui l’habitent. C’est un temps de retour sur soi, au gré des jours qui passent et des réflexions qui naissent. « Parfois, il est bon de tourner en rond / pour trouver le fil droit qui mène à soi », dit-il. Le poète observe, note ce qui se passe autour de lui et en lui, trace des chemins pour atteindre ce lieu intérieur où tout le paysage vient à sa rencontre.
Quelque part entre l’essai et la poésie, ce recueil est une longue méditation sur la quête poétique du quotidien. À travers un regard ancré dans un lieu qu’il contemple, le poète se montre attentif à ce qui advient et à ce qui se manifeste, dans la fragilité d’un instant qui se dérobe, « sans chercher autre chose que ce qu’il y a et qu’[il] ignore ».
Cet été improbable que suggère le titre du recueil est une faille à l’intérieur du temps, qui n’est pas accessible à tout venant, ni à quiconque ne se rend pas disponible par une sorte d’ascèse. C’est quelque chose qu’on apprivoise, tel un oiseau farouche, qui vient ou ne vient pas, et qui nécessite une présence attentive, soutenue. Et c’est avec une telle présence que tente d’écrire le poète tout au long du recueil, cherchant à décrire ce qui se révèle chaque jour.
Bien que le recueil, d’une écriture sobre et intimiste, n’entre jamais trop avant dans le lyrisme, plusieurs images nous saisissent, d’une touchante vulnérabilité. C’est ce qui fait la force de l’œuvre, car nous tremblons avec le poète devant la beauté du monde, celle qui nous renvoie à nos propres limites, lorsqu’il dit : « [J]e cherche à dépasser / le seuil de l’être afin de devenir / moi-même invisible, mais j’habite / trop près de mes ombres ».