L’auteur publie sa première œuvre de fiction après avoir affiné sa plume au Cercle d’écriture de l’Université Laval et sur Facebook. Une nouvelle voix qui désarçonne tant les atmosphères émanent d’une imagination débridée nourrie par des phénomènes paranormaux et un sens aigu de l’observation.
Il n’y a de banal que le premier texte, le portrait d’un skieur de chalet, genre de teigne que fuient les supposés amis. La nouvelle la plus longue et la plus étoffée s’inspire d’une véritable expérience menée en 1972 par le mathématicien généticien A.R. George Owen sur le phénomène de psychokinésie de groupe. « L’actrice » décrit la méthode de travail de celle qui, année après année, à chaque remise de prix, remporte celui de la meilleure actrice de l’industrie du cinéma. Elle a vu le reportage au sujet de la recherche susmentionnée et s’en inspire pour construire l’esprit des personnages auxquels elle donne ensuite corps. À la simple table de la recherche initiale sur laquelle les collaborateurs joignaient les mains, elle substitue la planche de Ouija.
« Le reliquaire » fait aussi appel à la science, l’astrophysique en l’occurrence. Le narrateur anthropologue est chargé de se rendre dans un village perdu de l’Italie pour découvrir le mystère qui se cache derrière un objet sacré, le reliquaire, qui, chaque matin à l’aube, est au centre d’une cérémonie à laquelle participent les anciens du village. Ceux-ci sont tenus au secret auprès des étrangers. Néanmoins le chercheur réussira à être admis dans le petit cercle et à émettre une hypothèse scientifique crédible. Une hypothèse que n’ignorait pourtant pas le curé, qui préfère entretenir une tradition fondée sur la superstition.
Le recueil s’inscrit bien dans notre époque où surviennent des ravisseurs, des agresseurs, des meurtriers aux stratégies de plus en plus inattendues (« L’invitée », « Récit descriptif », « Le visage ») ; une époque qui crée des jeux vidéo qui vous entraînent avec un réalisme effarant dans des scènes de guerre (« Patriotes ») ; ou encore qui ressent l’urgence de reverdir la planète avec les imprévus parfois dramatiques que comporte la recherche (« Verdure »). Dans l’ensemble des nouvelles, la tension provient de la description d’un climat fait de bruits incongrus de verrous, d’odeurs indéfinissables, de silences assourdissants, jusqu’à un visage trouvé dans une poubelle. Malgré cette tension qui culmine parfois dans des histoires de mort insolite, l’effet s’avère davantage ludique qu’horrifiant.
La singularité du recueil vient bien sûr du talent de l’auteur, qui excelle à créer des univers énigmatiques. Le vocabulaire juste et précis pour décrire tant les lieux que les actions n’y est pourtant pas étranger, ces descriptions autorisant le lecteur à imaginer lui-même la chute de certaines nouvelles. Éric C. Plamondon s’avère un écrivain prometteur engagé dans une voie peu fréquentée.