Dans le deuxième roman de la Mexicaine Carmen Boullosa, la plongée dans l’univers d’une petite fille persécutée par ses peurs nous ramène à nos propres craintes d’enfant, à la pensée magique et aux fantasmes propres à cette période fertile de la vie. L’écriture empreinte d’émotion de Carmen Boullosa s’accorde particulièrement bien à ce type de récit nourri de réminiscences et de réinterprétations. « Ainsi, l’enfermement dont je souffre me semble commode. [] Il n’y a qu’ici que je peux filer mon histoire avec autant de plaisir sans que les souvenirs soient interrompus lorsque je les convoque, car il n’y a ici rien d’autre que leur présence. »
On se demande en fait qui est la narratrice qui se souvient de son enfance, et dans quel monde elle vit désormais. Ses souvenirs, qu’elle nous livre par brassées, sont peuplés de voix étranges, de pas, de visages parfois. Ce monde hostile la poursuit, hante ses jours et ses nuits d’enfant qui cherche par tous les moyens à déjouer ses démons. Une histoire belle, pleine et ronde comme ces journées d’enfance qui sont une éternité, dont les traces demeurent tout au long de la vie et sur lesquelles se trame, avec les fils tendus du quotidien des adultes, une vie singulière et unique.
Voilà un petit livre qui nous atteint dans ce que l’on a de plus intime, cette part d’enfance qui subsiste en chacun de nous et qui s’accorde, tant bien que mal, avec notre présent. Car qu’y a-t-il de plus universel que ce que l’imagination d’un enfant crée à partir de la réalité ce monde fantasmagorique qu’on mettra toute une vie à apprivoiser !