Dans son deuxième roman, Véronique-Marie Kaye met en scène une femme forte mais superficielle. Dotée d’une extrême confiance en elle, d’une beauté à tout casser, d’un étonnant don pour la joie, Andréanne a néanmoins navigué dans une vie peu simple (trois mariages et trois divorces, un frère ayant une santé mentale fragile, des relations sexuelles souvent décevantes).
Elle a pourtant fini par se construire un quotidien confortable entre le centre sportif où elle travaille, les hommes qu’elle conquiert et un vilain penchant pour le voyeurisme. Elle surfe sur la vie, bizarrement incapable de toute profondeur. Deux rencontres sont censées bouleverser les choses : l’amant Nicholas et la locataire Clothilde.
Si une telle trame peut laisser croire qu’il s’agit d’un roman psychologique sur l’émancipation ou la découverte de soi, détrompez-vous ! Il y a quelque chose de « cartoonesque » chez Kaye : des personnages volontairement caricaturaux, un mordant comique et une absence de pudeur. Par son écriture, on dirait que l’auteure cherche à répondre à la superficialité ambiante non pas en creusant vers l’intérieur, l’intimité, la psychologie des personnages, mais bien en s’élevant encore un peu plus au-dessus de la surface.
Les personnages, les décors, les situations sont archétypaux : c’est un monde en deux dimensions. Par moments, le pari est moins réussi (les lieux communs sur les différences culturelles peuvent lasser), mais il faut saluer l’aspect peu convenu de cette voix romanesque et son réel sens du comique. Par exemple, les nombreux passages sexuels s’apparentent à une pornographie détachée de tout affect et même de tout désir : « Akitaka retira ses doigts coulants de moiteur » et « installa Andréanne – planta, bien droit, son nippon de pénis dans le vagin inespéré ».
Sur une note plus personnelle, il me faut avouer que ce parti pris m’a dérangée ; mais j’ai peur que cette limite parle plus de la lectrice que je suis que des qualités du livre. Le corps et la sexualité restent à mes yeux des enjeux trop sérieux et sensibles pour que je puisse adhérer à un conte qui mise sur l’humour potache, même si je reconnais que la distance ainsi créée pourra plaire à certains lecteurs. Ceux-ci non plus ne doivent pas se prendre au sérieux en allant à la rencontre d’Andréanne Mars.
ANDRÉANNE MARS
- Prise de parole,
- 2017,
- Sudbury
216 pages
22,95 $
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