Étrange et périlleux exercice que celui de réécrire l’histoire, surtout quand le quart de siècle remanié est bien connu du public. Alors que le Parti québécois se projetait dans l’avenir en publiant le budget de l’an I, le politologue Denis Monière s’attaque au granite indiscutable d’un passé dûment inscrit dans la mémoire commune. Il faut le faire ! Car Monière ne lésine pas : il inverse les résultats de 1980 et rend le Québec souverain.
Le plus étonnant, c’est que pareille pédagogie peut créer de beaux doutes. Voilà, en effet, que le Québec, ainsi émancipé par magie, se comporte en pays dit « normal ». Il s’exprime sur la scène internationale, assouplit les précautions linguistiques qui gênaient René Lévesque, modernise son mode de scrutin et garantit aux régions une part du pouvoir, etc. Tout cela, sans drame, parce qu’ainsi le veut la normalité. Monière se permet même de réconcilier les adversaires politiques. Dans un Québec souverain, Bourassa aurait proposé une nouvelle expansion hydroélectrique… Politique fiction, nous dit Monière. Certes, mais aussi pédagogie politique.