Quelque 70 ans avant la sortie du film de Bernard Émond paraissait La femme qui boit, premier roman d’une danseuse nue, licenciée ès lettres, issue d’une vieille famille universitaire française : Colette Andris. Après avoir livré cette étude minutieuse de l’alcoolisme au féminin, sujet tabou même en ces Années folles, la romancière publie Une danseuse nue, livre « infiniment nuancé ». « La danse nue, quel anonymat ! », observera l’écrivaine injustement oubliée de ce numéro. Preuve que toute chose mérite qu’on l’appréhende sous de multiples angles.
« Qu’y a-t-il de plus pertinent que la sexualité pour unir les deux sujets d’intérêt du prêtre, qui s’intéresse aux tréfonds de l’âme, et du scientifique, qui envisage la biologie comme un trésor de questions à élucider ? » Gardons-nous des jugements hâtifs : ni gestes ni propos inappropriés ici. Cependant une riche correspondance sur la sexualité humaine entretenue par deux êtres totalement inexpérimentés en la matière : l’auteur de la Flore laurentienne et sa collaboratrice Marcelle Gauvreau, de formation scientifique elle aussi. À travers trois ouvrages présentés par le passionnant sociologue et historien des sciences Yves Gingras, parcours en bref de « Marie-Victorin, un frère pas comme les autres ».
Plus près de nous, du moins dans le temps, rien ne va plus : « l’hystérie impose sa loi », écrit la professeure Laura Kipnis dans son explosif essai Le sexe polémique. Quand la paranoïa s’empare des campus américains. Climat de peur, prolifération des comportements vindicatifs, accusations abusives… « Toute la profession a été transformée en une classe sexuellement suspecte. » Kipnis défend des positions impopulaires « sans craindre d’arpenter les sentiers tortueux et contradictoires du savoir et du pouvoir, du désir et du sexe ».
Et – entre autres – dans ce numéro… L’univers sauvage et poétique d’Audrée Wilhelmy (une entrevue et deux autoportraits photographiques). Réflexions et discussions polyphoniques autour des « arts littéraires ». Le puissant roman de Paul Kawczak, Ténèbre, dont « la verve n’a rien à envier à celle des monstres sacrés de la littérature ». De poète à poète, un hommage de Michel Pleau à Nicole Gagné…
Un grand merci à Audrée Wilhelmy qui nous a permis de reproduire ses autoportraits.
En couverture : La route des Îles par Gwano
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Prendre la route pour se déconfiner de la ville et du bruit, pour remplacer les buildings par les montagnes, les constellations citadines par celles de la nature.