Artiste multidisciplinairevivant en France, Sophie Calle fait de sa vie le matériau de base d’une œuvre protéiforme, aussi riche et originale que peut l’être une vie dès lors que l’on s’interdit, fort justement, toute interdiction. L’exposition qui avait lieu, l’automne dernier, au Musée de la chasse et de la nature à Paris illustrait l’amplitude du talent et la polyvalence de l’artiste, qui avait investi ces lieux de ses créations plastiques et littéraires tout en respectant le caractère propre du musée. Le mariage des deux univers était des plus étonnants, et invitait autant au sourire qu’à la réflexion sur l’art.
Les éditions Actes Sud viennent de rééditer Des histoires vraies, initialement paru en 1994 et réédité à maintes reprises depuis. Le livre, accompagné d’images et de photographies réalisées parSophie Calle, ou par des amis proches de l’artiste, regroupe 56 micro-récits dont chacun illustre un épisode de la vie de l’artiste qui s’y met en scène. Le point de vue narratif retenu, on l’aura deviné, est celui de la première personne qui raconte l’histoire ou à qui l’on fait référence. Le projet aurait facilement pu verser dans l’application d’une recette, mais force est de constater que Sophie Calle sait doser les effets et les ingrédients afin d’éviter l’ennui, tout en assurant une cohérence à l’ensemble qui, autrement, pourrait verser dans le tape-à-l’œil. Le lecteur finit immanquablement par comprendre de quoi il retourne, par repérer le procédé, tantôt narratif, tantôt visuel, mais le sourire intelligent l’emporte sur la lassitude. Prenons, par exemple, la dédicace. Lors de sa première édition, Sophie Calle avait dédié le livre à un homme, dénommé l’étranger providentiel, disparu depuis de sa vie au fil des rééditions. La dédicace est demeurée, biffée par un X révélant la fin de la relation, et suivie d’une nouvelle dédicace adressée cette fois à son père, définitivement l’homme providentiel de savie, décédé peu avant son exposition. Dans le premier récit, la narratrice a neuf ans et trouve un jour une lettre adressée à sa mère qui contient le message suivant : « Chérie, j’espère que tu songes sérieusement à mettre notre Sophie en pension… » La lettre est signée d’un ami de sa mère, ce qui suffit à Sophie pour croire que ce dernier doit être son père. S’ensuivent les efforts du personnage de Sophie pour découvrir la vérité, pour lever le voile sur ce petit mystère. Cinquante-cinq autres histoires vraies attendent le lecteur, toutes aussi étonnantes et insolites les unes que les autres.
ESPACE PUBLICITAIRE
DERNIERS NUMÉROS
DERNIERS COMMENTAIRES DE LECTURE
Loading...