Il aura fallu près de vingt ans pour que ce roman monumental et pynchonesque paraisse en traduction française. Déjà considéré aux États-Unis comme un livre culte, L’infinie comédie date de 1996. Il s’agit du deuxième de trois romans laissés par cet auteur surdoué qui s’est enlevé la vie à 46 ans en 2008. Les deux autres, La fonction du balai (1987) et Le roi pâle (posthume, 2011), ont respectivement paru au Diable vauvert en 2009 et en 2012. Mais David Foster Wallace ne fut pas que romancier ; on lui doit aussi des nouvelles et des essais, dont quelques-uns sont déjà disponibles en français.
L’infinie comédie, c’est 1328 pages de prose déroutante, auxquelles s’ajoutent 158 pages de « notes et errata ». Par sa facture complexe et l’étendue de ses sujets (les relations familiales, le tennis, le culte de l’excellence, le défoncement aux drogues, aux médicaments et aux divertissements, la masturbation, la philosophie et même le séparatisme québécois !), cette œuvre semble impossible à résumer. Certains commentateurs y ont vu un exemple de « roman encyclopédique », c’est-à-dire un roman qui, au lieu de se concentrer sur l’évolution d’une intrigue, incorpore un foisonnement de connaissances et de représentations afin de tracer un portrait exhaustif et critique d’une culture donnée. L’Ulysse de Joyce et L’arc-en-ciel de la gravité de Pynchon sont souvent cités comme des modèles du genre. Si cette catégorisation convient à L’infinie comédie, il ne faudrait pas non plus l’y réduire. Le roman « total » de Wallace constitue également une dystopie dans laquelle les États d’Amérique du Nord forment une seule et même entité, où les années ne sont plus chiffrées mais commanditées (par exemple celle que Wallace appelle « année des sous-vêtements pour adultes incontinents Depend »), et où la société de consommation est passée à un stade d’aliénation très avancé. Le titre du roman fait d’ailleurs référence à une vidéo qui procure à ceux qui la regardent une surdose de plaisir et anéantit leur volonté.
Polyphonique, baroque, expérimental, satirique et totalement déjanté, L’infinie comédie ne s’adresse pas à tous les lecteurs, mais charmera ceux qui aiment en découdre avec un texte, déceler les sous-entendus, les jeux de mots, les clins d’œil et les citations cachées, en un mot, ceux qu’une écriture labyrinthique et logorrhéique n’effraie pas.
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