Début 2016, la Marocaine Loubna Abidar est en nomination pour le César de la meilleure actrice dans le film franco-marocain Much Loved, dans lequel elle tient le rôle principal d’une prostituée. Un an plus tôt, en 2015, elle avait reçu le prix Valois de la meilleure actrice au Festival du film francophone d’Angoulême et Much Loved avait été sélectionné à Cannes dans le cadre de la Quinzaine des réalisateurs. De grands succès et la gloire à la clé, pourrait-on croire. Pourtant, pourtant. Much Loved est aujourd’hui interdit au Maroc et vaudra l’anathème à la jeune femme, obligée de s’exiler en France. Devenue symbole de résistance, elle signe son autobiographie dans La dangereuse.
Loubna Abidar est née en 1985, dans la médina de Marrakech, du mariage d’un Amazigh ou Berbère et d’une Arabe. « Autant dire que c’était mal parti pour faire un bon mariage », les mariages mixtes étant mal vus d’un côté comme de l’autre. Ses parents sont déçus de son arrivée sur terre et lui feront vite comprendre. « Il était convenu que je serais un garçon. Il ne pouvait en être autrement, inch’Allah. » Après une petite enfance somme toute heureuse auprès de ses riches grands-parents, Loubna Abidar est élevée pauvrement et à la dure, auprès d’un père violent et d’une mère soumise. Elle apprendra vite à se débrouiller et à rechercher autonomie et liberté, tout un contrat pour une jeune musulmane du Maghreb dans les années 2000.
« Elle dérange. Trop libre. Trop franche. Trop femme. Jamais elle ne baisse les yeux, jamais elle ne retient ses mots. » Loubna Abidar raconte les étapes de sa vie, de la sujétion imposée par la religion et les traditions de son pays, jusqu’au Festival de Cannes, en passant par ses relations amoureuses. Elle découvre la France à seize ans avec son compagnon du moment et plus tard, le Brésil, avec celui qui sera « [s]on mari et le père de [s]a petite Luna ». Elle s’affirme de plus en plus, elle prend position et proclame haut et fort ce que plusieurs savent déjà. Elle dénonce la prostitution, l’hypocrisie, le mensonge et l’asservissement des femmes dans les sociétés traditionnelles. Elle s’autoproclame Abidar la dangereuse. « Abidar khatar. En arabe, la rime est menaçante comme un roulement de tambour. »
Ce sera le cinéma qui la sauvera, mais qui la piégera aussi. Le déluge d’insultes et de menaces sur les réseaux sociaux et dans la rue, l’appellation de pute qui lui colle à la peau, l’agression chez elle à Casablanca et enfin l’exil en France étaient-ils le prix à payer pour son audace et son franc-parler ?
Avec l’aide de Marion Van Renterghem, grand reporter au Monde, Loubna Adibar écrira le combat de sa vie, offrant un témoignage fort, qui dérange, dans un style coup-de-poing.
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