Par sa mesure, le titre inspire confiance : Dominique Lebel ne prétend pas avoir été le confident privilégié de Pauline Marois ; sobrement, il raconte deux années de travail à proximité des leviers de commande gouvernementaux. Autre élément sympathique, Lebel conserve, de part en part de cette expérience, les ancrages d’une vie équilibrée : la famille exerce ses droits ; le jour s’ouvre souvent sur une séance de jogging ; la lecture – Jean d’Ormesson, Stefan Zweig, Salman Rushdie, Thomas Mann… – parvient à se loger dans les anfractuosités d’un horaire affolant. Le préjugé favorable trouve à se nourrir.
Le contenu renforce ce premier sentiment. L’auteur privilégie les faits et raréfie les verdicts ; s’il prononce jugement, il le fait sans hargne. Ses évaluations, bien que nettes, évitent la virulence et ressemblent à un constat impossible à contenir plutôt qu’à une quelconque détestation. Preuve que la militance peut s’éloigner du chauvinisme ou de la caricature.
Néanmoins, Lebel ne pouvait ignorer une caractéristique du monde parlementaire : y sévit un taux hallucinant d’ego inflationnistes. Peut-être les partis à idées – et le Parti québécois en est un – sont-ils, plus que d’autres, contaminés par ce virus. Bien sûr, rares sont ceux qui présentent leur candidature en ne rêvant que d’un siège de député et qui n’escomptent aucune limousine ministérielle ; cette modestie semble pourtant fleurir plus difficilement dans les plates-bandes péquistes. Chose certaine, Lebel traite comme une évidence l’expansionnisme des ténors péquistes : ceux-là eurent tendance, comme ministres du gouvernement Marois, non seulement à gérer leurs ministères comme leur potager personnel, mais encore à exercer des pressions sur leurs collègues. « Martine [Ouellet] est une battante qui défend ses idées jusqu’à l’extrême limite. Elle ne lâche jamais. Il y a quelque chose d’à la fois exaspérant et attachant chez elle. » D’autres vont plus loin : « Jean-François Lisée a le don d’exaspérer ses collègues en commentant longuement et avec délice tous les sujets qui font l’actualité ». « De retour à la maison, écrit Lebel, j’ai un appel de Bernard Drainville. Il s’inquiète de la stratégie énergétique », thème à bonne distance de sa charte !
Et que dit Lebel de Madame, la première ministre ? « En dix-huit mois de gouvernement et trois semaines de campagne, je l’ai rarement entendue prononcer des phrases malheureuses. C’est l’une de ses forces. Très peu de dérapage. Beaucoup moins que ses adversaires. Mais elle a aussi les défauts de ses qualités. Elle fait peu de fautes, mais elle réussit peu de coups de circuit. »
Bilan pondéré et juste.
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