On peut tomber gravement amoureux d’une ville. L’intensité de la relation qu’entretient avec Rome le jeune étudiant montréalais d’On achève parfois ses romans en Italie n’a rien à envier à celles d’un Stendhal ou d’un Du Bellay par rapport à la Ville éternelle. Une Rome rêvée à la hauteur de ses fantasmes les plus enthousiastes. Tout le ravit. Absolument disponible à son pays d’adoption, il veut tout en connaître. Guide exemplaire, il étale avec une belle éloquence le génie italien.
Ces carnets de voyage littéraires sont farcis d’émois extatiques faisant la part belle aux superlatifs et à l’emphase. Avec ce côté ingénu totalement assumé, Francis Catalano s’imprègne de la culture italienne, absorbant toutes ses manifestations, cobaye bien volontaire à la métamorphose de son être. Une chance inouïe de faire tabula rasa, de remettre les compteurs à zéro : « Il est huit heures cinquante-cinq, les dés de ma destinée sont lancés au sol ».
On achève parfois ses romans en Italie appartient à cette forme de littérature égocentrique (à prendre positivement au sens étymologique), où tout émane du personnage narrateur pour revenir vers lui, occupé qu’il est à scruter ses émotions spontanées. L’action se situant il y a deux décennies alors que l’auteur lui-même étudiait à l’Université La Sapienza de Rome, les textes se présentent comme les douces rêveries d’un touriste au départ solitaire qui tisse lors de son séjour des relations d’abord utilitaires, puis franchement amicales, solides, avec les Romains. Et toujours cette relation pétrarquisante avec la belle Carolina, qui ajoute une tension électrique au récit poétique de ce Ronsard on the road…
Subissant le choc émouvant de la culture classique, Francis Catalano cherche à insuffler à son style le sublime de ce qu’il s’efforce de décrire. La langue en est à ce point ciselée que le naturel en écope. Connu davantage comme poète, l’auteur signe un premier roman le rapprochant d’un esthète à la Huysmans ; comme lui, il ne dédaigne pas l’usage de l’épithète rare et une tournure maniérée. Il s’accordera même le luxe de palabrer parfois sur des détails insignifiants, mais qu’à cela ne tienne, Catalano sait décomposer un moment pour en extraire la richesse grâce à une approche à la fois sensible et intellectualisée.
Pour sa pétulance et sa fraîcheur, voilà un roman à offrir à quiconque compte séjourner – ou l’a déjà fait – un certain temps en Italie.