Les études sur la masculinité sont encore naissantes dans la francophonie, comparativement aux nombreuses publications sur les identités masculines parues principalement aux États-Unis, dont l’encyclopédie Men & Masculinities (2004) de Michael Kimmel et la revue universitaire du même nom. Ici, le récit collectif des Québécois reste encore à être conceptualisé.
Ouvrage axé sur l’image en noir et blanc, cette Histoire des hommes québécois en photos regroupe plus d’une centaine de photographies de garçons et de messieurs ‘ mais aussi de leurs compagnes, de leurs filles et de leurs mères ‘ au cours des deux derniers siècles. La plupart de ces portraits, en majorité anonymes, demeurent emblématiques de la vie d’antan : scènes de mariage devant le gâteau à trois étages, couple nuptial assis dans la voiture décapotable, portraits de famille, voyages de pêche, communiants, troupes de scouts. On y voit aussi beaucoup d’ouvriers, d’artisans, de menuisiers, d’épiciers, de marchands ambulants, de membres du clergé et même le vieux quêteux du village. Quelques « célébrités » de naguère sont également photographiées : le romancier Philippe Aubert de Gaspé, le curé Antoine Labelle, le hockeyeur Jean Béliveau.
Le livre se subdivise en six sections thématiques, de l’enfance charmante et ronde jusqu’à la vieillesse. Les photographies les plus anciennes datent de la fin du XIXe siècle, montrant quelques scènes de colonisation dans les Laurentides et en Abitibi ; les plus récentes remontent seulement aux années 1970, et illustrent la pilosité abondante de cette génération : moustaches, barbes, cheveux longs. Certains moments révolus sont également représentés, comme la bénédiction paternelle.
Si l’intérêt des images est indéniable sur les plans visuel et historique, les commentaires restent assez faibles, surtout lorsque Hélène-Andrée Bizier s’avise de refaire le procès du clergé québécois pour compenser l’absence de données factuelles pour l’une ou l’autre des photos. À propos du déclin du contrôle des naissances, on peut lire un commentaire chargé de ressentiment anticlérical : « […] vers le début des années 1960, l’inquisition visant les couples mariés s’estompa ». Ce n’est pas l’endroit le plus approprié pour tenir de tels propos, du reste pas très nouveaux. En somme, l’ouvrage déçoit si on le compare au premier titre de la trilogie, Une histoire du Québec en photos.