La préface écrite par la résistante Lucie Aubrac aurait pu être un gage de qualité de Carnets d’un héros ordinaire. Il n’est qu’un gage de solidarité à l’égard d’un ancien camarade. « Je me contenterai de dire que j’ai connu ces maquisards, leur enthousiasme, leur courage, leur sacrifice. » La grande héroïne Lucie Aubrac – ou Lucie Bernard Samuel (1912-2007) – a été récemment enterrée en France avec les honneurs militaires, en présence des plus hauts dignitaires de la République.
Il n’est jamais facile de ressusciter les confidences qu’un être, aussi exceptionnel soit-il, a consignées dans de petits carnets. Même si l’auteur complète son récit avant de mourir, comme l’a fait Jean-Claude Stern en se livrant à sa fille Viviane Koenig, l’éditrice de Carnets Le collage qu’elle nous propose ne suffit guère à soulever notre intérêt, mais comment ne pas approuver lorsqu’elle écrit : « Il n’était qu’un résistant ordinaire au courage inouï et à la modestie confondante ».
Jean-Claude Stern, né à Paris en 1919, d’origine juive, a tout perdu : « sa famille, morte à Auschwitz, et tous ses biens, sa jeunesse, le plaisir de faire des études » Lui et les siens n’avaient aucun soupçon : « L’horreur qui les guette est tellement inimaginable qu’ils ne l’imaginent pas ».
La valeur des Carnets est d’aider les jeunes générations à comprendre le maquis français et la vie des partisans. Le témoignage que fait un jeune homme des derniers jours de la guerre souscrit au devoir de mémoire. La banalité des gestes donne au récit un ton éminemment réaliste. « T’as du tabac ? Passe-moi ton briquet » ou encore : « Ma tante m’offre les lunettes de mon cousin Jacques, jeune soldat mort il y a quelques semaines ».
Mobilisé au début de la guerre, Stern connaît l’humiliante défaite. « Avec mes compagnons, je marche toute la nuit, mêlé à la grande débâcle. » Il a hâte de retourner à la maison. Ce sera long car entre-temps il y aura les Chantiers de jeunesse, la France libre et le premier contact avec la Résistance en 1941. Stern doit choisir : Londres ou le maquis. Il choisira.