Même si, comme dans tout ouvrage collectif, les contributions sont d’inégale valeur, une certitude s’impose : autant que sa rivale, la droite a droit à son temps de parole. Ce n’est ni en l’ignorant ni en lui niant tout mérite qu’on nourrira le débat démocratique. Certains lecteurs profiteront de ce livre pour la mieux détester ; d’autres puiseront ici de quoi la vanter sur la place publique ; tous la connaîtront mieux.
La démarche choisie par le coordonnateur Nelson Michaud frappe par son bon sens. D’abord, pour savoir de quoi l’on parle, la définition des termes. Ensuite, un regard sur le regain de popularité de la droite. Enfin, la relation de la droite avec les divers types de formation politique, la démocratie et les contextes canadien et étatsunien.
La plupart des textes paient tribut aux usages universitaires, dans certains cas jusqu’au jargon inclusivement. Les choses sont dites dans le respect des nuances, à distance des procès d’intention. Toute fiction de neutralité est cependant laissée au vestiaire lorsque Gilles Paquet ou Pierre Simard prennent la parole. Le ton se fait ardent, cinglant, vengeur. Simard, accusant la gauche de s’abreuver à « la théorie du complot », estime que les politiciens « n’ont guère à craindre de devoir répondre de leurs gestes ». Il en trouve la preuve dans le débat autour du protocole de Kyoto : « Alors que les spécialistes ne s’entendent pas sur les causes du réchauffement de la planète, tous s’entendent cependant pour affirmer que l’objectif canadien est inatteignable ». Un peu court ! Heureusement, les nuances reviennent dans l’historique présenté par Jean-François Caron, dans le survol que présente Xavier Gélinas de la droite québécoise, dans le parallèle qu’établit Robert Bernier entre les partis dotés d’un programme et ceux qui obéissent aux circonstances ou dans le regard que porte Louis Balthazar sur le conservatisme canadien et celui de nos voisins du sud. On lira avec un sourire le texte de Maurice Pinard et Pat Rafail sur ce que les médias appellent le « mystère québécois », autrement dit les succès de l’ADQ et de Stephen Harper à Québec et dans ses environs. Il est clair, sondages à l’appui, que le conservatisme de la capitale déborde le cadre politique et s’étend aux questions syndicales ou morales. Cela ajoute à l’ampleur du mystère, mais ne l’explique pas.
Livre nécessaire en ce qu’il nourrit presque toujours sobrement un débat essentiel.