Roman d’une confession impossible. Le trop-plein d’un thriller aux prétentions pathologiques et psychologiques. L’histoire d’un monstre au cœur tendre qui viole tout ce qui lui passe entre les pattes, de préférence les membres féminins de sa propre famille. L’amateur de romans policiers et de thrillers en a vu bien d’autres, certes ; de ce calibre, rarement, à tel point qu’il n’osera croire tout à fait à cette histoire. Il veut bien lire des horreurs, ce peut être palpitant ; il veut bien croire à tous les possibles de l’humain, mais là, dans ce livre, il « débarque », comme qui dirait, parce qu’il sent, chez l’auteur, un désir d’en mettre beaucoup, d’en mettre trop, sans que ce soit toujours appuyé par du vrai, du véridique, du crédible qui se tient, du romanesque vraisemblable. Il, l’amateur, dirait que l’auteur recherche absolument l’effet pervers. Et cette recherche aboutit dans un champ de mines mouillées.
Pourtant, Michel Bergeron a l’étoffe d’un écrivain. Il écrit bien, à n’en point douter. Il a le sens de la formule. Il sait manier sa langue et nous la servir sur un plateau. La lecture de ce roman n’en est pas moins difficile parce qu’il y a sans cesse des coupures dans le déroulement du récit, des retours en arrière, des envolées dans tous les sens, de l’italique qui sème une confusion pas très romanesque. Le lecteur doit revenir en arrière, rechercher le sens linéaire du récit, ce qui gâche le plaisir de sa lecture. Il est évident qu’il doit faire des efforts, mais ses efforts doivent se porter sur la suite du récit, même si elle peut être complexe, sur la véracité des faits, sur la vraisemblance de la psychologie des personnages, non pas sur la construction romanesque, hélas, douteuse, là n’est pas son rôle. L’auteur ne doit pas perdre son lecteur dans les méandres de son texte, surtout pas le romancier, qui doit accompagner son lecteur tout le long de son voyage, non pas l’abandonner sur la route, sans lui laisser quelque chose qui lui indique le chemin à suivre. Les belles phrases, les bons mots, les pensées sur l’amour ou les relations familiales ne suffisent plus quand on se sent perdu, abandonné ou laissé pour compte.