Le Christ a été cloné. Imaginez un peu ! En plus par les Américains. Vous voyez le tableau Formidable imaginaire de Didier van Cauwelaert, Goncourt 1994. L’évangile de Jimmy, c’est une aventure scientifico-politico-mystique de haute volée, un pur délice littéraire nourri des dernières recherches sur le clonage et de questionnements théologiques inattendus, le tout rendu avec un humour sarcastique frisant le sacrilège. Une jubilation.
Comme dira Jimmy, « [c]e n’est pas le Verbe qui s’est fait chair, c’est la science qui m’a fait clone ». Jimmy est le fils du linge, on parle bien entendu du Linceul de Turin, soit dit en passant pour les incultes : le cinquième évangile. Bon, faut reconnaître que c’est difficilement croyable pour un gars du fin fond du Connecticut, réparateur de piscines, de se faire annoncer par la CIA et la Maison Blanche qu’il est le clone d’un Illustre. L’auteur nous sert les évidences sur un plateau d’argent et oppose aux réserves casuistiques des évidences du style : s’Il a dit : « Prenez et buvez », pourquoi pas « prélevez et clonez » ? On pourrait croire que Didier van Cauwelaert fait triompher la science sur la religion, mais c’est sans tenir compte du Verbe haut de l’auteur qui écrit tout en paraboles… jusqu’à certaines vérités décidément toujours bonnes à dire : que la source de la vraie foi se niche dans le doute, par exemple. La foi, c’est s’interroger, c’est une conséquence, un élan du cœur ! C’est l’inquiétude et non le dogme qui fait la croyance. Le Dieu nouveau est revenu sur Terre pour démontrer que c’est notre humanité qui importe, elle seule nous relie au divin. On ne naît pas Fils de Dieu, on le devient.
La révélation offerte par Jimmy ? L’Homme doit achever sa création en se délivrant de la peur de la mort et de la prison de la matière. La recette consiste à croire en nos pouvoirs, donc à croire en nous. Ce n’est pas de la foi, mais de l’autosuggestion.
À bon entendeur .