L’idée de tenir à l’Université McGill un colloque consacré à « Madeleine Parent, ses luttes et ses engagements » était excellente. Tout aussi louable la décision de regrouper en bouquin les textes présentés dans ce cadre. Encore aurait-il fallu, pour que la haute figure de Madeleine Parent reçoive son dû et devienne intelligible aux jeunes générations, qu’un texte fiable et substantiel lie ensemble les contributions et comble les lacunes que laissent forcément des témoignages sectoriels. Ce n’est pas que les témoignages de Françoise David, de Rick Salutin et de Monique Simard ou que les retours en arrière de John Lang, de Lynn McDonald et de Lynn Kaye manquent de pertinence ou de chaleur ; c’est qu’ils n’éclairent que par touches successives et éparses cette immense carrière sans en révéler les secrets.
Les mystères inexplorés ne manquaient pourtant pas. Un témoignage signale, par exemple, que Madeleine Parent « vit en Ontario depuis 1967 », tandis qu’un autre, tout aussi laconique, affirme ceci : « Elle était à l’époque un peu oubliée au Québec, qu’elle avait quitté, malgré elle, une douzaine d’années auparavant ». De la même manière, il aurait été plus qu’utile, puisqu’on prête à Madeleine Parent une véritable ferveur pour un syndicalisme canadianisé, de préciser ce qu’était pour elle le nationalisme. Le sien est, de toute évidence, plus canadien que québécois, mais mieux aurait valu en préciser le contenu. Peut-être aurait-on alors compris pourquoi, par-delà la légitime antipathie éprouvée au départ pour le Québec clérical et duplessiste, Madeleine Parent a quelque peu tardé à se réconcilier avec les revendications québécoises.
Advenant une nouvelle édition, peut-être pourrait-on aussi harmoniser l’affirmation qui, en quatrième de couverture, fait naître Madeleine Parent en 1919 et celle qui, en page 10, la fait naître « quelques mois avant l’armistice de novembre 1918 ». Hommage nécessaire, mais insuffisant.