Il n’y a pas eu « négligence » chez les services secrets américains, Ben Laden n’est pas un ami subitement « retourné », la guerre contre l’Afghanistan n’est pas non plus une initiative improvisée en réaction à la tragédie du 11 septembre. Non, il existe plutôt une cohérence dans l’exercice de la politique étrangère américaine au fil des dernières présidences pour le soutien, l’encouragement et l’hébergement du terrorisme international. C’est ce que tente de démontrer Michel Chossudovsky arguant que le fondamentalisme islamiste a toujours constitué un « instrument » de la politique américaine via les interventions bien planifiées de la CIA pour la défense à tout prix des intérêts géopolitiques et économiques de l’empire américain. Qu’il s’agisse de la guerre contre la Serbie, du conflit tchétchène ou du régime honni des Talibans, la politique américaine ne visait pas à endiguer le phénomène de l’islamisme radical. Au contraire, elle encouragea son extension, sa perpétuation.
La cohérence n’est donc pas à rechercher entre les objectifs déclarés dans la lutte contre le terrorisme et la justification d’une « nouvelle » orientation des États-Unis depuis septembre 2001. La population américaine a été trompée, il y a là mensonge, c’est la « pire fraude de l’histoire américaine » selon l’auteur. Le nouvel ordre mondial annoncé par George Bush père a maintenant perdu sa façade sous la présidence du fils en devenant la « Nouvelle Guerre de l’Amérique », une guerre de conquête de nouveaux marchés. Au delà de la description des liens inextricables entre individus ou organisations, des affaires louches ou en sous-main et de la conjonction d’événements surprenants, l’auteur nous pousse à regarder derrière le rideau de la sécurité et de la liberté américaines en « péril ». L’ouvrage replace le contexte stratégique des décisions et des actions de la politique étrangère américaine au sein de l’affrontement des intérêts politiques et économiques entre les grandes puissances.
Ce réquisitoire bien mené nous laisse par contre sur notre faim. La rigueur de l’analyse se situe en deçà de la force convaincante de l’opinion qui croule sous les nombreuses répétitions. Des zones grises demeurent aussi par manque de matériel et d’évidences, alors l’argument de l’auteur perd des plumes lorsqu’il s’agit de cerner la dimension manipulatrice du discours de l’administration américaine.