Voici (enfin !) un livre positif sur l’autisme, écrit de l’intérieur, sans apitoiement, et porteur d’un authentique message d’espoir. Si on ne peut pas espérer guérir de ce syndrome méconnu, souvent caractérisé par l’incommunicabilité, on peut néanmoins apprendre à « vivre avec » ses inconvénients et à apprivoiser sa différence. Antoine Ouellette, musicien et par ailleurs atteint du syndrome d’Asperger, a écrit Musique autiste afin de témoigner de sa double expérience de compositeur et d’enseignant à l’Université du Québec à Montréal, en dépit de son autisme. Comme il l’explique, les symptômes de l’autisme sont difficiles à détecter ; c’est seulement à 47 ans qu’il a reçu son diagnostic.
Dans la première moitié du livre, l’auteur décrit son quotidien et nous fait comprendre « sa différence », comme il le dit si justement, et ses rapports parfois difficiles avec son entourage, sa difficulté à freiner sa spontanéité, sa trop grande franchise, sa grande pudeur, et toutes les caractéristiques inhérentes à sa condition d’Asperger. Il n’hésite pas à se qualifier de « fou », empruntant ainsi le vocabulaire des autres à propos de la maladie mentale. Il commence ainsi son livre autobiographique : « […] je viens d’apprendre que je suis fou ». Pourtant, son ouvrage est d’une grande cohérence et empreint d’enthousiasme. Énumérant des particularités générales des autistes, l’auteur note leur franchise, leur loyauté, leur persévérance et leur capacité d’écoute.
Antoine Ouellette commente ensuite son travail de compositeur et évoque brièvement sa thèse de doctorat sur la musique. Son rapport à la lecture est aussi intéressant : il se souvient d’avoir appris à lire non pas dans des ouvrages pour enfants, mais dans les encyclopédies de ses parents. Plus loin, il évoque comment le fait d’être autiste peut comporter des avantages pour un créateur ; ainsi, sa tendance obsessive, qui s’accompagne parfois de comportements répétitifs (comme la palilalie), lui facilite certains apprentissages. Cette dimension se reflète aussi dans ses goûts musicaux et dans son admiration pour les œuvres de Steve Reich, souvent décrites comme répétitives. Dans une formule élégante et appropriée, Antoine Ouellette décrit sa propre création instrumentale comme « un art brut musical ». Ouvrage unique et touchant, Musique autiste a été finaliste au prix Hubert-Reeves pour la valorisation d’ouvrages scientifiques « grand public » en 2012.