Publié dans la collection « Hamac », réservée à des textes de fiction « profondément humains qui brillent par leur qualité littéraire », ce recueil s’avère prometteur malgré sa couverture tristounette. Attirant, surtout si l’on a assisté au spectacle déambulatoire Où tu vas quand tu dors en marchant… ?, présenté la première fois en 2009 dans le cadre du Carrefour international de théâtre et repris en mai 2010. Voilà donc 37 histoires brèves fignolées par les auteurs à partir des secrets confiés par des anonymes à la demande du Carrefour, et chuchotées par des acteurs dans les « Jardins secrets » aménagés au parc Lucien-Borne, premier tableau du spectaculaire parcours. Chaque acteur ne s’adressait qu’à trois ou quatre marcheurs-spectateurs à la fois, autour d’un lit, la nuit venue, de sorte qu’un seul secret ne leur était divulgué. Ce recueil, qui donne accès à l’ensemble des secrets, prolonge la magie de ce spectacle théâtral exceptionnel et enchantera les personnes qui n’ont pu y participer.
Steve Gagnon, tout comme sa complice comédienne et metteure en scène Véronique Côté, sont diplômés du Conservatoire d’art dramatique de Québec. Aussi dramaturge, Gagnon s’est fait remarquer en 2008 avec sa pièce La montagne rouge (SANG), qui lui a valu la bourse Première œuvre. Dans Chaque automne j’ai envie de mourir, leur écriture confère une unité à l’ensemble du recueil en dépit des sujets hétéroclites qui n’ont en commun que le fait d’être des secrets anonymes. Les sources sont multiples et fort différentes : des femmes et des hommes, l’un nostalgique, l’autre indiscret, collectionneur, émerveillé ou écolo ; il y a même celui qui avoue manger… ses crottes de nez. Mais la narration au « je », le rythme, le ton et les marques d’oralité reviennent dans plusieurs textes, créant l’illusion de l’auteur unique en plus de rappeler la fonction première des textes qui est d’être dits. Paradoxalement, le choix d’une langue plutôt familière – car le secret intime a quelque chose de hautement émotif et est destiné ici à des oreilles bienveillantes –, loin de nuire à la qualité littéraire du recueil, contribue au ton intimiste qu’exige la confidence. C’est dire que ce recueil de deux jeunes auteurs talentueux apparaît comme un patchwork littéraire des plus réussis et des plus attrayants.