L’auteur raconte la mort tragique de son oncle maternel, Daniel Maroy, assassiné en mars 2014 dans sa ferme du Hainaut, en Belgique. Les auteurs du crime appartenaient à une petite bande de jeunes loubards appâtés par l’argent facile. Dans le patelin d’Estaimpuis, tout le monde savait que le vieil ermite de 84 ans ne faisait pas confiance aux banques et gardait son argent à portée de main.
Vivant en marge de la société et peu soucieux de son apparence, « oncle Daniel […] avait beaucoup [de surnoms]. Le crasseux. Le clochard. L’ermite. Et donc aussi Jésus-Christ. À cause de sa barbe et de ses cheveux longs ». Dans les milieux étroits, il n’est pas bon de trop se distinguer. « Il déplaisait », résume son neveu. Dernier représentant de sa lignée, cloîtré dans la ferme familiale où il était né, son mode de vie était comme la critique d’un monde plein « de voyous et de filous ». Et il n’avait pas tort.
Dans son coin sévissait une petite bande de glandeurs un peu paumés, souvent issus de familles brisées, peu scolarisés, laissés à eux-mêmes et abonnés à la petite criminalité. Un jour, après avoir fumé quelques joints, l’un d’eux propose « d’aller à la ferme du vieux crasseux » pendant qu’il est au supermarché local. Arrivés sur place, alors que Daniel rentre de ses courses, ils le frappent sauvagement à la tête. Ils le laisseront pour mort sur le plancher de sa cuisine et s’enfuiront avec les 13 000 euros qu’il avait sur lui. Un pactole !
Tout contents de cette richesse nouvelle, ils s’empressent de la dilapider en gadgets électroniques, moto-cross, vêtements de marque, etc. Avec une belle insouciance, ils ne se privent pas non plus de se vanter de leur forfait autour d’eux. Si bien que la police a tôt fait de leur mettre la main au collet. La seconde partie du livre raconte le procès qui s’est tenu cinq ans plus tard et dans lequel l’auteur s’était porté partie civile.
Chris de Stoop rapporte dans le détail non seulement les circonstances de l’agression de son oncle Daniel et son propre parcours judiciaire mais aussi, en filigrane, sa démarche pour se réapproprier son histoire familiale sur fond de nostalgie d’un mode de vie qui disparaît peu à peu et dont son oncle était un des derniers représentants. Bien plus que l’histoire d’un fait divers tragique, son livre est un superbe portrait de société, en même temps que la plus belle épitaphe qu’on puisse écrire pour « un homme sans histoire. Une biographie vide ». Un très beau livre.