« J’empoigne le temps comme un fruit mûr, impossible à transmettre. L’œuvre de liberté survivant aux cailloux de l’enfance. »
Si son premier recueil, La maison suspendue (2017), évoquait le départ des enfants devenus grands, La porcelaine des oies relate le cheminement de la poète qu’on devine seule en suivant les saisons qui correspondent à autant d’étapes de sa vie.
Le recueil est divisé en quatre parties, chacune construite autour d’une saison, de l’automne à l’été, et propose une réflexion sur les relations humaines, une réflexion qui naît de ce qu’elle vit au jour le jour : « J’agence ma peau selon le jour », écrit-elle, tout en constatant que « [j’]ignore tout de ma peau quand j’avance ». Ainsi, on a l’impression de l’accompagner dans son journal intime.
Les oies ponctuent le temps, quittant le territoire à l’automne (« Je sais par cœur la porcelaine des oies sauvages tombées de froid »), revenant au printemps (« Les oies sont revenues plus tard à la cime fondante des toits »), symboles de son cheminement. Les oies, c’est aussi la possibilité de voir le monde de « haut », de prendre une distance avec ce qu’on vit et d’ainsi mieux y faire face.
La première partie, « Un pacte intangible », évoque son enfance, les difficultés de la vie et la solitude qui semble être notre lot, mais que l’on se doit d’assumer : « Dépassé le temps de secourir, je ramène un pacte intangible à la force des solitudes » alors que « l’autre » n’est plus là.
« La perte sans l’absence », car « perdre n’est pas toujours une absence » alors que l’hiver s’impose. Elle enchaîne les moments qui nomment le lent mouvement de ses sentiments envers celui qui n’est plus dans sa vie, mais dont le souvenir demeure tendre.
« Une vague réconciliée » voit le printemps et les oies revenir, mais aussi l’harmonie en elle : « Dans le coin supérieur de ma fenêtre, je cherche la vraie mesure de mes ailes ».
« Le temps comme un fruit mûr » lie son enfance et son présent. Le temps a décanté la relation passée : « Dans le regard, je conserve la plus belle part de toi-même ». L’image des oies revient, annonçant sa détermination : « Je cesse d’être une oie blanche au bout d’une ficelle ».
La douceur est au cœur de l’écriture d’Hélène Poirier. Les textes, tous de très courts poèmes en prose, procèdent par petites touches comme autant d’instants dont elle sait saisir l’essence. La simplicité du propos résonne dans la musicalité des phrases.