C’est une fin d’après-midi d’automne, et il pleut à verse. Voilà qu’un étranger apparaît soudainement à travers la vitre de la porte d’entrée, au bout du couloir où l’enfant s’amuse à organiser de spectaculaires courses de bolides miniatures. Son jeu se trouve ainsi interrompu.
Une scène précise vécue par un jeune garçon lors d’un insolite après-midi d’automne, en 1950, le poursuivra tout au long de son existence. Une scène qui pourrait paraître de prime abord plutôt anodine, mais qui éveillera chez l’enfant un sentiment de perplexité, voire d’inconfort. C’est que la réaction de sa mère devant cet homme (qui n’est visiblement pas un inconnu pour elle) le laisse songeur. Son instinct lui fait deviner que quelque chose de singulier s’est passé, à ce moment-là, au cours de ce bref événement. Profondément imprégnée dans son cerveau, l’image de la silhouette de l’énigmatique inconnu l’accompagnera désormais comme souvenir unique, ou à tout le moins dominant ; qui fera de l’ombre, pour ainsi dire, à tous les autres.
Un souvenir tellement marquant qu’il doit sans cesse y revenir et que les détails (comme le papier peint fleuri sur les murs du couloir et le parquet fraîchement ciré) de cette journée particulière resteront gravés de façon indélébile dans sa mémoire. « Jusqu’à sa mort, les couloirs sombres viendront le hanter dans ses rêves. » Les brefs textes composant cette novella révèlent peu à peu diverses occasions où cette puissante et obsédante vision refait surface dans la mémoire de l’enfant devenu homme. Chacun de ces courts segments a été ciselé en finesse jusqu’à la quasi-perfection, de la main d’orfèvre de l’auteur, et enrobé d’un effluve poétique.
Le ton intimiste et confidentiel adopté par Donald Alarie donne à ses lectrices et lecteurs l’impression de se voir confier des secrets jusque-là profondément enfouis. Donc, de bénéficier en quelque sorte d’un précieux et exceptionnel privilège.