Tout ce que vous auriez voulu savoir sur Xavier Dolan sans jamais oser le demander…
L’œuvre de Xavier Dolan a déjà fait l’objet d’une étude (dans Philosopher à travers le cinéma québécois. Xavier Dolan, Denis Côté, Stéphane Lafleur et autres cinéastes de Pierre-Alexandre Fradet) publiée à Paris aux éditions Hermann, mais la monographie substantielle du professeur Laurent Beurdeley– de l’Université de Reims – lui est entièrement consacrée. L’ouvrage, qui couvre l’enfance du réalisateur jusqu’au long métrage Ma vie avec John F. Donovan(2018), est remarquablement bien documenté, fourmillant d’une infinité d’analyses, d’extraits de critiques, de références en bas de page, de citations révélatrices et de témoignages glanés sur Internet. Il ne tente pas pour autant de déifier le cinéaste, qui admettait, en 2014,ses propres exagérations quant à ses connaissances: « Je mens énormément sur ma culture, je suis obligé ». Toutefois, au fur et à mesure qu’il accumule les reconnaissances et les consécrations, Xavier Dolan peut avouer ses insuffisances, comme de ne pas connaître des classiques du cinéma ou de n’avoir rien vu de « la filmographie de Rainer Werner Fassbinder » !
Menant une carrière parallèle dans l’industrie du doublage, Xavier Dolan a prêté sa voix au personnage de Ron Weasley dans la version québécoise de Harry Potter. Bien avant J’ai tué ma mère(2009), il avait fréquenté dès son plus jeune âge les plateaux de tournage ; ce fut son école, à plusieurs niveaux: « Il absorbait les diverses conversations des adultes qui, devant lui, ne s’interdisaient pas de blasphémer, de raconter crûment leurs histoires intimes et d’évoquer leur consommation de drogue ».
En tant que cinéaste, même après tant de succès, l’auteur de Mommy(2014) était réticent à tourner à Hollywood, dans un univers implacable, dominé par l’argent et des guerres de réputations souvent surfaites: « Aux yeux des actrices et acteurs que j’ai approchés, je n’existe pas. Ils me disent non ou alors, ils ne répondent carrément pas ». D’autres réalisateurs québécois comme Jean-Marc Vallée et Denis Villeneuve ont également tourné à Hollywood, mais sans jamais avoir de droit de regard sur le montage définitif (le « final cut »), ce qui est inadmissible.
Laurent Beurdeley ne laisse rien de côté et ne néglige aucun court métrage, aucune participation, même mineure, de Xavier Dolan, sans oublier ses vidéos, ses lettres ouvertes aux quotidiens, ses déclarations, ses sorties. Par la bande, c’est un peu l’ensemble du cinéma québécois contemporain qui est ici examiné, et celui-ci serait présentement caractérisé par « un humour grave et âpre ». Par son exhaustivité, Xavier Dolan. L’indomptable est un livre inégalable, un modèle du genre.